Ousmane Sow est un sculpteur d'origine sénégalaise qui travaille la glaise.
Il extrait de la terre des corps, des émotions, il réussit en la modelant à en catalyser l'énergie et à la matérialiser dans des oeuvres qui sidèrent par leur expressivité.
Son travail me touche beaucoup, depuis longtemps. Il me semble qu'il réussit à figurer des tempéraments forts, à saisir la vie pour la figer dans la glaise et conférer ainsi à ses oeuvres une puissance troublante.
J'ai repensé à lui et à son travail après avoir vu "Mud" l'excellent dernier film de Jeff nichols (dont j'avais déjà parlé ici à propos de Take Shelter qui m'avait déjà profondément troublée) Parce qu'il y a un clin d'oeil symbolique, biblique, qui réside dans le choix de ce surnom "Mud".
La boue, c'est ce mélange de terre et d'eau d'où nait la vie, qu' Ousmane Sow réussit comme personne à transfigurer pour faire d'une masse informe des êtres qu'on croirait vivants.
Ce film, "Mud" donc, m'a touchée.
Il y a l'endroit, d'abord.
Les rives du Mississipi avec leurs maisons sur pilotis et la maestria de Jeff Nichols quand il s'agit de filmer les grands espaces et les destins (grands ou petits).
Les vies que l'on suit, ici, sont celles qui font partie du monde d'Ellis, jeune garçon en pleine construction qui veut croire en l'amour (disons plutôt qu'il en a besoin, compte tenu des circonstances).
"Mud" fait l'effet de ces romans d'aventure dans lesquels on se plonge avec délectation, se laissant embarquer loin : Il y a là le fleuve et la vie simple de ceux qui vivent dessus, les serpents menaçants, les personnages intriguants et la cabane accueillante, où nait l'aventure (le bateau perché, quelle apparition magique!).
J'ai toujours été sensible au genre : le film (ou le roman) d'initiation qui évoque cette période délicate de la transition vers l'âge adulte. Ce moment où l'on quitte l'insouciance de l'enfance pour basculer de l'autre côté, celui des responsabilités et de la dure réalité. Alors forcément, le thème du film en lui-même avait déjà tout pour me séduire.
Mais en plus, il y a Mud.
Mud est cet homme que deux gosses (dont Ellis) vivant sur les rives du Mississipi découvrent un jour, par hasard.
Un serpent tatoué sur le bras, une chemise porte-bonheur avec un oeil de loup cousu dans la doublure, une croix cloutée dans le talon de ses bottes. Et -bien sûr- un revolver.
"Mud ment comme il respire. Les gens l'aiment parce qu'il les flatte".
Mud est comme ça. On devrait le détester car tout le monde s'accorde à dire qu'il arrange la vérité à son avantage, qu'il utilise les autres pour arriver à ses fins mais... Mud est étrangement attachant.
Ellis est séduit par son récit, cette histoire d'amour contrariée, sans doute parce qu'à ce moment là de sa vie, autour de lui l'image qu'il a de l'amour est en train de voler en éclat. Il s'embarque dans une histoire qui le fera grandir...
Jeff Nichols rend l'ensemble captivant et d'une beauté sidérante.
Bien sûr pour terminer en musique comme à l"'accoutumée, je te glisse un peu de Bob. Parce qu'on ne met jamais assez de Dylan dans sa vie, si tu veux mon avis! (Mississipi, forcément)
A ce propos, en ce moment chez H&M tu peux te procurer un T-shirt Bob Dylan pour moins de 15 euros. Si toutefois tu en veux, c'est rayon "Homme" qu'il faudra aller. Moi, bien entendu, j'ai craqué...
Plus d'infos sur Ousmane Sow? Par ici, sur son site officiel...
Commenter cet article